Willi Bopp / Camille Emaille / Gianni Gebbia / Heiner Goebbels / Cécile Lartigau / Nicolas Perrin : The Mayfield
The Manchester Mayfield railway station : une gare urbaine construite à la fin de l’ère victorienne d’architecture typiquement anglaise, dotée d’une armature de poutrelles en acier et ceinte de murs en briques encrassés de suie. Un bâtiment qui a vu des milliers de voyageurs passer sous ses arches pendant près d’un siècle et qui se trouve aujourd’hui désaffecté. C’est là qu’Heiner Goebbels a présenté « Everything that happened and would happen », une pièce théâtrale multimédia alliant sons, éclairages, textes et vidéos. De ce travail naîtra la rencontre avec les quatre musiciens présents ici ainsi que l’alliance avec un ingénieur son, Willi Bopp, spécialement affecté au processus de création. Dès les premières secondes du disque, on pénètre dans un monde à part, un labyrinthe de Borges, une sorte de dédale où les sons rentrent en collision les uns les autres sans crier gare. Hormis pour les saxophones joués par Gianni Gebbia et pour le piano préparé où officie Goebbels, il est difficile de dire avec précision qui fait quoi. Les ondes Martenot de Cécile Lartigau se mêlent aux attaques de la guitare customisée et à l’électronique de Nicolas Perrin que ponctuent des à-coups sourds et métalliques des percussions de Camille Emaille. Pour peu, on serait tenté d’étiqueter cet album dans l’obscure catégorie « électro-acoustique ». Les seize pièces alignées proviennent d’un matériau à l’origine bien plus large. Elles se suivent sans rupture et sans discontinuité pendant près de 75 minutes, soit la durée maximale sur support cd. Leur écoute requiert curiosité et résilience tant l’excursion s’avère déroutante.