E.S.T. Trio, Essentials
E.S.T. (Esbjörn Svensson Trio),
Essentials – 3 CD Box
Certains concerts vous marquent la vie d’un homme. D’autres sont vite oubliés. Incontestablement, la prestation offerte par le trio d’Esbjörn Svensson ce soir de mai 2007 au Festival Jazz à Liège (qui, à l’époque, n’était pas encore sponsorisé par une société pharmaceutique) restera gravée à jamais dans ma mémoire ! Oserais-je le dire, c’est ce concert-là – et aucun autre – qui a servi d’enclencheur pour attirer mon attention vers le jazz. Bon d’accord, pas tout à fait exclusivement… N’empêche : je m’y vois encore clairement. La salle était bondée, les trois musiciens occupaient toute la largeur de l’immense scène avec l’assurance de ceux qui savent qu’ils disent vrai. Au sommet de sa forme (et malheureusement, sans que nous le sachions, au sommet de sa gloire), le trio dégageait une puissance peu commune à ce niveau-là. Un piano, une contrebasse et une batterie. Rien de bien original ne pouvait nous arriver sur le coin de la tronche. Et personnellement, je n’ai pas vu la baffe venir. Alors qu’on aurait dû lui reprocher de « tout mélanger », on se félicitera finalement de l’avoir laissé faire ! La puissance du rock, la liberté du jazz et la mélancolie du néo-classique : Esbjörn Svensson a fourré le tout dans une vieille marmite et, au bout d’un moment, nous a servi la musique la plus innovante de ces vingt dernières années. Combien sont-ils à l’avoir suivi ? De Radiohead à l’ensemble du nouveau jazz britannique, en passant par le Bad Plus, on pourrait tous les citer. Et on ne sait jusqu’où Esbjörn Svensson nous aurait emmenés sans la foutue passion qu’il entretenait également pour la plongée sous-marine. Une passion qui l’a tué il y a un peu plus de dix ans. Après un « Live in London » inédit que Jazz Around a chroniqué il y a quelques mois, le label allemand Act a souhaité commémorer les dix ans de la disparition du génial pianiste en publiant un nouveau coffret de trois cédés tout simplement intitulé « Essentials ». Outre la pierre angulaire du trio Viaticum (2005), se trouvent également dans ce box joliment illustré par le designer suédois Gàbor Palotai, Strange Place For Snow (2002) et From Gagarin’s Point of View (ce titre est un poème à lui-seul!). Vous avez autour de vous un(e) ami(e) qui se dit ouvert(e) à la découverte de la musique jazz. Un peu hésitant(e) ? Vous savez à présent quoi lui offrir en cette fin d’année.
Joseph « YT » Boulier