Lightnin’ Hopkins : In New York

Lightnin’ Hopkins : In New York

Candid ‐ Références cataloque : CCD30102, réédition 2022

Voilà une réédition très attendue (1). En octobre 1960, Hopkins vint seul à New York pour un séjour plus long que lors de sa visite précédente, quelques années auparavant (pour enregistrer « Folkways », ..) mais sans s’attarder dans la Grosse Pomme. C’était la première fois qu’il s’engageait dans un cycle de concerts dans des night clubs de l’Est. Il n’aimait pas se produire devant des publics blancs, une renommée internationale ne l’intéressait pas, il préférait jouer devant les publics noirs de Houston, sa ville natale, et au Texas. Hopkins pensait que ses blues racontant ses expériences de vie et sa dureté, son intimité, ses rapports avec les femmes et les gens en général, la ségrégation, les peines et les tragédies, ses préoccupations journalières (nourriture, santé, …) ne pouvaient pas intéresser un public blanc. A New York, en 1960, après 2 expériences foireuses dans des hôtels miteux, il fut hébergé pas Martha Ledbetter, veuve de Huddie Leadbelly. Et là, il se sentit à l’aise pour aborder l’épreuve de ces concerts avec public blanc. Le premier se tint en octobre au Carnegie Hall, en compagnie de Pete Seeger, Joan Baez, Bill McAdoo et d’autres. Hopkins remporta un franc succès avec un répertoire de chants humoristiques et folk, évitant ses blues trop personnels, dramatiques et tristes. Il prit ensuite de l’assurance au Village Gate où il « osa » jouer ses blues « tranches de vie » et quand il entra en studio Candid pour graver ces 8 faces, il était relax et naturel, comme à Houston. Très en verve et totalement décomplexé, il rappela aux producteurs qu’il avait commencé sa carrière à l’orgue puis au piano, avant de passer à la guitare et il souhaita montrer qu’il se défendait bien au piano. Cela a donné un trépidant « Lightnin’ s Piano Boogie » instrumental avec changements de tempo (slow puis rapide et slow) et un surprenant « Take It Easy » où il chante et passe allégrement du piano à la guitare et inversement, sans à-coups et avec dextérité. Dans la même veine, on a « Your Own Fault Baby to Treat Me the Way You Do », un slow blues au piano, introverti et décontracté tout à la fois. Le reste est aussi du pur Texas blues rural comme Hopkins en avait le secret : de « Mighty Crazy », mi-parlé et mi-chanté où il dialogue avec sa guitare sur un rythme de boogie, à « I’ve Had My Fun If I Don’t Get Well No More », en slow et mélancolique, en passant par de très personnels « Trouble Blues » et « Wonder Why » avec intros parlées et changements de rythme, pour conclure avec « Mr. Charlie » où Hopkins démontre ses talents de storyteller. Ceci en 2 parties : un talking blues de près de 4 minutes suivi d’une partie chant-guitare en slow (plus de 3 minutes).

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(1) l’album Candid de 1960 (CS/CM8010) comportait une face supplémentaire (« Black Cat »). Pourquoi cet « oubli » ? 5 autres faces de cette séance parurent sous le label Mosaïc.

Robert Sacre