Loïs Le Van & Alban Darche : Les Mots Bleus
Yolk Music / L’Autre distribution
Loïc Le Van est loin d’être un inconnu dans nos belges contrées : il obtient son master au Conservatoire de Bruxelles avec David Linx, travaille avec Diederik Wissels, et s’insère dans le paysage jazz de Bruxelles via un enregistrement avec le « Bravo Big Band » et sa participation à « Murmures » de Tom Bourgeois. Pour avoir suivi ses sorties ces dernières années, je confirme que Loïc Le Van ne laisse jamais indifférent et se crée un parcours hors des sentiers battus, que ce soit sur ses albums personnels ou ses collaborations. Son nouvel opus est bien dans la ligne d’un artiste surprenant et ouvert à tous les possibles. « Les mots bleus », oui, il s’agit bien de ce tube de Christophe, chanson ressassée sur toutes les chaînes de radio, tout comme « Comme d’habitude » de Claude François, « Si j’étais un homme » de Diane Tell ou « Les moulins de mon cœur » de Michel Legrand… Arrêtons là la liste afin de ne pas faire fuir les jazzophiles ! Non, finissez de lire cette chronique et allez écouter ce magnifique album de Loïs Le Van !
Le projet : un duo avec Alban Darche, déjà ça titille votre curiosité. Le saxophoniste, leader du « Gros Cube », auteur de « Clover », de « Dandy Dandie » et de bien d’autres réussites du jazz français, se joint au chanteur pour une série de duos augmentés, des trios. Sur les treize titres, Loïc Le Van et Alban Darche invitent un musicien. Des pianistes d’abord, avec Sandrine Marchetti (superbe de profondeur sur « Comme d’habitude »), Baptiste Trotignon sur deux titres, Yonathan Avishaï sur le morceau-titre et Bruno Ruder sur une chanson de Maria Carey. Trois guitaristes : Paul Jarret et Alexis Thérain sur des thèmes plus rock, et Nelson Veras. La harpiste Emilie Chevillard sur du Radiohead. Sylvain Rifflet sur le seul standard jazz de l’album, « I’ll Be Seeing You » où les deux sax s’entrecroisent. Et la contrebasse de Leïla Soldevila sur « Imagination » de Billy Withers. Certes, la liste est longue mais il ne fallait pas manquer d’évoquer tous ces musiciens magnifiquement investis sur cette rondelle, car il n’y a rien à jeter dans ce melting pot, pot-pourri auquel le chanteur donne une cohésion étonnante. On a d’ailleurs du mal à imaginer que, comme le précise pourtant le dossier, tous ces morceaux sont le résultat d’une improvisation instantanée. C’est doux et tendre, avec une touche de préciosité qui colle à la voix de Loïs Le Van, mêlée à la rugosité du ténor, avec lesquelles s’entremêle le chant poétique et parfois électrique (le très beau « Old Man » de Neil Young) des invités. Renommé pour leurs créations respectives souvent hors des sentiers battus, le duo magique n’hésite pas ici à emprunter des chemins balisés pour les illuminer de nouveaux paysages sonores insolites.