Dishwasher_ : en programme intensif

Dishwasher_ : en programme intensif

En un an à peine, le trio belgo-néerlandais Dishwasher_ a confirmé les espoirs placés en eux et imposé le respect. On les a rencontrés au Volta d’Anderlecht où ils nous ont offert un concert en mode rinçage…

Dishwasher_ © France Paquay

Nous nous sommes rencontrés il y a tout juste un an. Vous souvenez-vous dans quelles circonstances ?

Arno Grootaers (batterie) : Oui, je me souviens bien de toi ! On a essayé de parler un peu le français… Il n’était pas terrible… Et ça ne s’est pas amélioré (rires).

Exact ! C’était à Rotterdam…

Louise Van Den Heuvel (basse) : Le Festival In Jazz, en juin… Nous étions frustrés ! Il y avait du retard et tous les journalistes sont partis après un seul morceau parce qu’une navette les attendait pour les emmener à un autre concert (le violoniste George Dumitriu jouait au large, sur un bateau – NDLR).

Personne ne vous connaissait à l’époque… Mais je savais que je devais rester pour vous voir !

Werend Van Den Bossche (saxophone, effets) : Oui, tu as été le seul journaliste dans la salle…

«Faire un disque, c’est stressant !»

Que s’est-il passé depuis ?

L.VDH : Après, nous avons enregistré notre album, qui vient de sortir en avril…

Vous y pensiez déjà il y a un an ?

L.VDH : Oui, nous avions déjà le répertoire, nous étions prêts.

W.VDB : Nous voulions enregistrer notre musique.

A.G. : Nous avons enregistré l’album au mois d’août. En juin, quand nous nous sommes vus, nous étions déjà occupés à finaliser le projet. Il fallait rassembler tous nos titres, choisir lesquels nous allions garder…

L.VDH : Nous souhaitions aussi reproduire notre son « live ». C’était l’une des options possibles. Bien sûr, il y a eu quelques rajouts, mais nous souhaitions nous approcher le plus près possible de l’atmosphère « Live ».

On dit de Dishwasher_ à présent qu’il représente un espoir du jazz, vous êtes très jeunes !

L.VDH : Merci !

C’est une question… (rires)

L.VDH : C’est plutôt difficile de répondre à cela…

«Nous sommes trois personnes différentes et c’est bien !»

Maintenant que vous commencez à être connus, est-ce que vous ressentez une certaine forme de pression ?

A.G. : Oui et non… Personnellement, je la ressens moins maintenant qu’avant d’enregistrer le disque… Faire un disque, c’est stressant. On aime qu’il soit bien fait… Mais à présent qu’il est sorti, on peut passer à autre chose, à nouveau rejouer sur scène.

Arno Grootaers © France Paquay

« In jazz » contribue à faire connaître la scène néerlandaise… Considérez-vous que vous faites partie de la scène néerlandaise ?

A.G. : Oui, je pense…

W.VDB : On fait des concerts aux Pays-Bas.

Pour ma part, je vous associe davantage à la scène londonienne, à Shabaka. Comme pas mal d’autres groupes flamands en fait…

A.G. : Oui, c’est pas faux…

L.VDH : Nous aimons chacun des musiques différentes et parfois, il y a des musiques que nous aimons tous. Comme Shabaka que tu viens de citer, ou Floating Points (un producteur de musiques électroniques – NDLR).

A.G. : La scène anglaise, Shabaka en est le leader depuis dix ans. Les Anglais ont introduit des sons électroniques dans le jazz, comme le Portico Quartet. Avant de nous connaître, nous écoutions déjà cette musique tous les trois. On a vite réalisé que nous avions des goûts en commun. On était surpris quand on s’est rendu compte que nous avions les mêmes disques, que nous écoutions les mêmes groupes.

L.VDH : Nous sommes des personnes différentes, et c’est bien. Mais oui, il y a un terrain commun, un cercle où nous mettons des choses en commun, nos influences personnelles.

«Nous abordons la musique de façon jazz, avec cet état d’esprit. Mais notre son et notre vocabulaire ne sont pas jazz.»

Vous êtes installés à Gand ?

W.VDB : C’est à Gand que nous nous sommes rencontrés…

A.G. : On a tous étudié à Gand à un moment donné. On a commencé à jouer là-bas, puis on s’en est un peu éloignés.

L.VDH : Arno et moi, on s’est rencontrés à Maastricht. Puis on a connu Werend à Gand. Il est le seul à encore y habiter. Pour ma part, je me suis installée à Bruxelles. Les distances restent courtes…

A Rotterdam, vous m’aviez dit que vous jouez du jazz pour ceux qui ne l’aiment pas, qui y sont réticents… Vous pouvez vous expliquer ?

L.VDH : Oui. « Jazz for the non-jazz believers… ». Mais c’est juste un terme.

A.G. : En fait, ce n’est pas très important. Nous abordons la musique de façon très jazz, avec cet état d’esprit. On improvise beaucoup. Mais notre son et notre vocabulaire ne sont pas si jazz… C’est plutôt électro, rock ou ambient… Et jazz un peu. En disant cela, on tente de convaincre ceux qui n’aiment pas trop le son du jazz, le swing, … De leur dire qu’ils pourraient aimer notre musique. Qu’elle pourrait résonner en eux, comme pourraient le faire la techno ou le rock.

L.VDH : Une passerelle vers le rock…

W.VDB : Ou vers le jazz ! Peut-être qu’en nous écoutant, ils s’intéresseront un jour à Coltrane. On aime cette idée de faire de la musique pour toutes ces personnes différentes.

Werend Van Den Bossche © France Paquay

Comment s’est passée votre approche avec les labels, les managers ?

L.VDH : On travaille avec une structure de management, ça aide… (NDLR : Aubergine, qui travaille de part et d’autre de la frontière linguistique et qui s’occupe aussi de Guillaume Vierset, Nabou, Antoine Pierre, Echoes of Zoo, Aka Moon, …)

Sont-ils venus spontanément à vous ?

W.VDB : Non, nous avons démarché nous-mêmes.

L.VDH : Notre label Sdban nous a bien aidés aussi en proposant des interviews dans les médias. C’est important pour la reconnaissance…

W.VDB : Sdban a d’abord souhaité nous impliquer dans la compilation « Jazz Cats ». Quand ils ont su que nous allions enregistrer nos titres, ils ont donné leur accord pour l’album. Ça s’est fait naturellement.

L.VDH : Dans le groupe, c’est Arno qui s’occupe de tout ça… Il sait qui il faut contacter. Dans un premier temps, ils n’ont pas répondu. C’est lorsque nous avons fait quelques concerts, qu’on a commencé à être un peu connus, qu’ils sont revenus vers nous.

W.VDB : On ne s’arrête pas maintenant que l’album est sorti. Nous avions déjà d’autres choses en dehors de Dishwasher_, on joue beaucoup, on expérimente de nouvelles choses.

Louise Van Den Heuvel © France Paquay

Je pensais que vous n’aviez pas beaucoup de concerts il y a un an d’ici…

L.VDH : Si, nous jouions. C’étaient des concerts un peu différents, dans des plus petits endroits, des cafés… Ça nous a permis de nous tester.

A.G. : D’une certaine façon, c’était bien pour démarrer le groupe.

Et à présent ? On vous invite dans de beaux festivals, vous sortez votre disque… Parlez-vous de carrière entre vous ? Dishwasher_ est-il un groupe professionnel ?

L.VDH : En fait, nous sommes déjà tous des professionnels de la musique. Nous avons étudié la musique, c’est notre job. Bien sûr, on a aussi beaucoup d’autres activités musicales en dehors du groupe. On enseigne par exemple, on joue avec d’autres musiciens.

W.VDB : Clairement, oui ! Nous voulons être des musiciens professionnels.

Des concerts et de la reconnaissance en Wallonie, ça aiderait non ?

(Tous ensemble) : Oui, c’est un gros problème pour nous.

W.VDB : On a eu un contrat dans une brasserie… Mais il a été annulé.

L.VDH : On a vraiment envie de jouer en Wallonie !

Dishwasher_ au Gent Jazz le jeudi 6 juillet. Informations : tickets.gentjazz.com

Dishwasher_
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Sdban / N.E.W.S.

Chronique JazzMania

Gent Jazz 2023
Du 5 au 15 juillet.
www.gentjazz.com

Focus JazzMania

Propos recueillis par Yves Tassin
Merci à France Paquay pour les photos… et la traduction !