Arne Jansen, Anders Jormin, Uwe Steinmetz : The Pilgimage

Arne Jansen, Anders Jormin, Uwe Steinmetz : The Pilgimage

Traumton Records

Ce nouveau trio s’est cristallisé autour de deux musiciens allemands – le saxophoniste Uwe Steinmetz et le guitariste Arne Jansen – et d’un Suédois : le contrebassiste Anders Jormin dont les disques personnels et en sideman avec Tomasz Stańko et Bobo Stenson appartiennent au plus beau fleuron du jazz européen. Il est assez symbolique que ce trio germano-suédois se soit produit pour la première fois en 2016 dans une cathédrale, celle de Göteborg, dans le cadre d’un festival de musique religieuse, car tout ici est empreint de spiritualité : aussi bien les titres du disque et des morceaux (« La Peregrinacion » basé sur un chant d’Ariel Ramirez, le compositeur de « Missa Criola », « Procession », « Peace Of The Earth » …) que la musique elle-même, tout en retenue et en profondeur. Une pièce éthérée et quasi religieuse comme « He Who Counts the Stars » par exemple, a été inspirée au guitariste par le compositeur estonien Arvo Pärt dont la musique sacrée habitée par la transcendance sous-tend le jeu du trio. Quant à « Deep Wood », il fait référence au sanctuaire de la Madonna d’Ongero, un lieu de pèlerinage immergé dans un petit bois au-dessus de Carona.

Propice au recueillement et à l’intériorité, la musique est globalement sereine, empreinte d’une douce chaleur, interprétée avec juste ce qu’il faut de ferveur, sans surjouer ni l’émotion ni la passion. L’absence de rythmique met en exergue l’importance de la contrebasse, dont les sonorités boisées et enveloppantes constituent une voix essentielle du trio. « Je veux consacrer mon travail à l’esprit, à la chaleur et à l’humanité », dit Anders Jormin dans le texte de présentation, résumant ainsi son credo au moins pour cet album. Le guitariste joue avec sobriété, colorant les harmonies de nuances subtiles tout en évitant la moindre aspérité. Quant à Uwe Steinmetz, pourvoyeur de lumière à l’alto et au soprano, il habite les mélodies avec élégance et séduit par son expressivité, même lorsqu’il se retrouve tout seul, comme sur la longue introduction de « The Promise ». Quand elle est portée par la conviction, l’émotion arrive toujours à percer.

Pierre Dulieu