J. Peter Schwalm & Arve Henriksen : Neuzeit
Tous deux sont des acteurs importants du nu-jazz et des adeptes de musiques électroniques improvisées. L’Allemand J. Peter Schwalm est surtout connu pour ses collaborations avec le pape de l’ambient, Brian Eno, avec lequel il a cumulé les projets (dont une installation sonore au creux du cratère du volcan Del Cuervo – île de Lanzarote) et enregistré deux albums au début de ce siècle. Par ailleurs, il a fondé le groupe d’electro-jazz expérimental Slop Shop (trois albums) grâce auquel il a été repéré dans le milieu de l’ambient, avant de se lancer dans une carrière solo qui compte à présent un troisième album dans l’écurie RareNoise Records. Quant à la trompette caractéristique du Norvégien Arve Henriksen, on la retrouve sur une vingtaine d’albums, en solo ou au sein du trio Supersilent, pratiquement tous publiés par le label Rune Grammofon. A deux, ils se sont accordés pour concevoir ce disque. Le sujet : le Neuzeit, un terme référence au développement de notre civilisation. Plus clairement aux incertitudes qu’elle connaît. Incertitudes liées au réchauffement climatique, à la pandémie mondiale qui nous est tombée dessus… Incertitudes aussi face aux instabilités politiques qui se multiplient sur la planète. Un sujet, huit thèmes, mais un seul concept musical qui semble former une seule œuvre. Des compositions ambient, une instrumentation en conséquence (claviers et effets électroniques assurés par Schwalm, percussions et notes diffuses de trompette pour Henriksen) : immanquablement, on pense à Jon Hassell ou aux travaux instrumentaux de David Sylvian avec lequel Arve Henriksen a collaboré dans le passé. « Neuzeit » est le disque typique d’une époque que nous espérons bientôt révolue, celle du virus. Etant dans l’impossibilité de se rencontrer physiquement en studio, les deux musiciens ont conçu ce disque par correspondance. Ce qui a donné lieu à un long travail de reconstruction et de mixage, même si cette musique semble à l’oreille avoir été répétée de longue date. Entre humanisation (une voix, les thèmes de la trompette, les touches d’un piano discret) et prise de pouvoir des machines, « Neuzeit » plonge l’auditeur dans le tourment. Sans doute les effets de son versant mystérieux, voire un peu angoissant qui nous captive, à défaut de nous rassurer…
Schwalm & Henriksen © Anja Jahn
Yves «JB» Tassin