Jean-Sylvain Cabot: Eric Clapton ‐ Blues Power

Jean-Sylvain Cabot: Eric Clapton ‐ Blues Power

Outre une auto biographie, il existe peu de livres en français consacrés au guitariste anglais. Celui-ci est l’œuvre d’un ex journaliste de Rock & Folk, auteur de cinq ouvrages dont ceux consacrés à Fleetwood Mac et à The Who. « Blues Power » retrace le parcours du guitar hero et est scindé en six parties, les six décennies durant lesquelles Clapton s’est retrouvé sur le devant de la scène, plongé ou non dans l’enfer de ses addictions. Les détails de sa vie, et ils sont nombreux, font partie intégrante du récit et il est indéniable que c’est cela qui nous maintient parfois en alerte. Sans avoir été un grand fan (je ne l’ai vu qu’une fois sur scène) je me suis amusé de toutes ces anecdotes (l’apparition des mots « Eric is God » sur les murs de Londres en 1965 ou le fait qu’il joue chaque 31 décembre à Woking avec différents musiciens et chaque fois sous un nom de groupe différent ), les cancans amoureux (dont Pattie Harrison, la femme de son ami Georges ou sa brève liaison avec Carla Bruni qui était avec Jagger à l’époque), les rencontres à travers le monde, les exils… Mais il y aussi des drames, dus à l’alcool (beaucoup), aux drogues (tout autant), des dérapages (dont cette tirade xénophobe en 76 lors d’un concert londonien). Des évènements qui détruiront des amitiés et des groupes. Après l’évocation de son enfance, de sa découverte des bluesmen noirs américains, tout démarre en 62 par des concerts en duo avec Dave Brock, futur fondateur de Hawkwind ! Puis se succéderont les Yardbirds, les Bluesbreakers de John Mayall, avec des commentaires de Tony Mc Phee (Groundhogs) et Peter Green (Fleetwood Mac). Vient alors Cream, groupe dans lequel il aurait voulu la présence de Stevie Winwood aux claviers mais qui fut refusée par Ginger Baker et Jack Bruce. Il avoue n’avoir pas été chaud pour former Cream, ni Blind Faith. Viendront ensuite Derek and The Dominos dont on ne sauvera pratiquement que « Layla ». Et le drame du batteur Jim Gordon qui tua sa mère en 1983 ! « Blues Power » nous dévoile aussi d’autres moments importants de sa vie, comme ses rencontres avec les américains Delaney and Bonnie, The Band et surtout J.J.Cale. Et enfin il y a cette longue carrière solo lancée par « 461 Ocean Boulevard » et le hit « I Shot the Sheriff » emprunté à Bob Marley. A partir de là c’est le succès mondial, Clapton s’autorise l’ordre, le calme, la sérénité via une musique plus folk / blues / ballades. C’est là aussi que les « puristes » décrochent !

Jean-Sylvain Cabot nous offre des descriptions, parfois chirurgicales, de tous les albums et de nombreux concerts de Clapton (musiciens, titres). Il nous informe sur toutes les rééditions, les coffrets, les éditions de luxe. Mieux encore, l’auteur nous avertit quand des visions sont disponibles sur le web… Mais surtout (et c’est important), il évite de caresser Clapton dans le bon sens du poil parce qu’il écrit un livre sur lui ! SJC n’est vraiment pas tendre envers le guitariste, ni avec sa musique : quand ce n’est pas bon, ce n’est pas bon ! Certains disques sont mauvais à l’exception de quelques titres. Aucun album n’est décrit ici comme étant un chef d’œuvre absolu. Mais n’oublions pas que Clapton n’a jamais désiré devenir une star du rock. Il voulait « simplement » jouer de la guitare, rester dans l’ombre et n’avoir aucune responsabilité ! C’est tout le paradoxe de la destinée d’un petit garçon qui idolâtrait Robert Johnson, Buddy Guy et Buddy Holly et qui allait devenir une icône. Ce livre n’est donc pas le récit d’un fan, ce qui est plutôt louable. C’est l’exposé de la vie d’un grand musicien, piètre compositeur mais heureux piocheur, qui est resté sur le devant de la scène pendant soixante ans, admirant ceux qui l’ont secondé. Et leur restant souvent fidèle.

Jean-Sylvain Cabot
Eric Clapton ‐ Blues Power
Le mot et le reste

300 pages
22 €
ISBN : 9782361396770

 

Claudy Jalet