Joëlle Léandre : Deux albums live
De Joëlle Léandre nous avons dit beaucoup déjà. En juin dernier, nous vous présentions une conversation au cours de laquelle elle revenait sur son jeu, son travail, sa démarche (Entretien JazzMania). Deux nouveaux enregistrements live prolongent ses propos. Le premier est capté sur le vif lors du festival ARTACTS dans la station de sports d’hiver tyrolienne de St. Johann à l’hiver 2023. Joëlle est aux côtés de la pianiste autrichienne Elisabeth Harnik et du batteur/percussionniste slovène Zlatko Kavčič. Outre son clavier, la première utilise une série d’objets hétéroclites. Le second assure une rythmique qui ne suit aucune cadence assignée, privilégiant les à-coups, les à-côtés. Au milieu, Joëlle avance, charge, s’arrête, temporise, reprend, prend. Parfois elle parle, parfois elle murmure, parfois elle éructe, parfois elle chante. La connivence entre les trois musiciens est patente et sert à merveille leurs improvisations. Elisabeth et Joëlle se connaissent pour avoir déjà joué et enregistré dans le passé. Itou pour Elisabeth et Zlatko. Publié sur le label polonais de la Fundacja Sluchaj, l’enregistrement restitue assez fidèlement l’atmosphère du live que mettent en relief les applaudissements nourris repris à la fin.
En duo avec la vocaliste Lauren Newton, c’est un témoignage plus court – une grosse demi-heure à peine – qu’elle nous livre, saisi au Great Star Theater à San Francisco lors du Other Minds Festival en octobre 2022. C’est un véritable dialogue qui est ici à l’œuvre entre les deux protagonistes et que renforcent leurs affinités sélectives communes et peut-être le fait qu’elles soient de la même génération. Newton recourt à plusieurs techniques vocales, toutes à dominante expressionniste, elle préfère les onomatopées aux mots. Un savoir-faire qu’elle a mis au service de formations classiques, mais aussi de compositeurs et de musiciens/musiciennes répertoriés jazz tels Anthony Braxton, Aki Takase, Barre Philips ou Myra Melford. La rencontre entre Joëlle et Laurence remonte au mitan des années 90 et s’est déjà matérialisée à travers plusieurs disques dont « Conversations in Ljubljana », paru il y a plus de douze ans, préfigurait celui-ci.