Le dossier Intervalles du mois – Décembre : Nick Drake #1
En partenariat avec la radio Equinoxe FM (105.0 à Liège et streaming), JazzMania vous proposera tous les mois un dossier musical spécifique. Chaque mois, un thème, toujours sous le signe de la (re)découverte, en mots et en sons.
Ce vingt-cinq novembre, nous commémorions le cinquantième anniversaire de la mort de Nick Drake, sans doute l’un des chanteurs / compositeurs / guitaristes les plus doués du folk anglais… Et le plus méconnu aussi ! Nous reviendrons sur sa (trop) courte carrière durant une saga comprenant deux épisodes…
1. Nick Drake : From the Morning (« Pink Moon ») ‐ Island
« From the Morning », le tout dernier titre qui figure au répertoire officiel – de son vivant – de Nick Drake. Nick Drake, l’un des auteurs-compositeurs les plus méconnus du folk-rock britannique, un chanteur et guitariste extrêmement doué auquel nous consacrerons les deux prochains dossiers mots et sons que vous pouvez retrouver sur notre site. Nous verrons ensemble comment ce jeune chanteur si british a raté sa vie artistique avant de devenir un personnage culte bien des années après sa mort. Sa tombe se situe dans le village de son enfance, à Tanworth, et on peut lire, gravé sur celle-ci, un court extrait de cette chanson « From the Morning » : « Now we rise and we are everywhere » (« Maintenant nous nous levons et nous sommes partout. »)
2. The Dream Academy : Life in a Nothern Town (« The Dream Academy ») ‐ Blanco y Negro
Les raisons de cet insuccès, nous y reviendrons abondamment plus tard. Par contre, le statut d’icône que Nick Drake a obtenu par la suite s’explique un peu moins bien. L’élément déclencheur pourrait être cette chanson du groupe éphémère The Dream Academy. Une chanson coproduite par David Gilmour (ça peut aider), une chanson dédiée à Nick Drake (certes) mais surtout une chanson qui a atteint de belles places dans les charts à sa sortie, en 1985. « Life in a Nothern Town ».
3. Ben Harper : Time Has Told Me (« The Endless Coloured Ways ») ‐ Chrysalis
« Time Has Told Me » n’est certainement pas la plus belle chanson de Nick Drake. Mais elle est emblématique tant elle décrit l’état d’esprit dans lequel il s’est trouvé durant le court laps de temps où il a tenté d’être reconnu. « Je vais donc laisser les moyens qui font de moi ce que je ne veux vraiment pas être, laisser les moyens qui me font aimer. Ce que je ne veux vraiment pas aimer. » Avec cette chanson, celle qui ouvre son premier album, Nick Drake pose déjà les balises de son échec. En voici la version enregistrée par Ben Harper dans le cadre d’un hommage : « The Endless Coloured Ways ».
4. Nick Drake : Time of no Reply – Orchestrated version (« Made Love Magic ») ‐ Island
Nous sommes en 1967, une année charnière déjà pour Nick Drake qui n’a encore que dix-neuf ans. Il est doué pour pas mal de choses : la course à pied, la musique. Il pratique le saxophone, le piano et finit par s’intéresser à la guitare qu’il accorde selon ses besoins. Enfin, il compose ses premières chansons qu’il chante le soir au Collège devant ses amis. Parmi elles « Time of no Reply » qui, curieusement, restera inédite avant que ne paraisse une compilation éponyme sortie à titre posthume. En voici une version retravaillée avec orchestre par son ami Robert Kirby.
5. Nick Drake : The Thoughs of Mary Jane (« Five Leaves Left ») ‐ Island
C’est aussi à cette époque qu’il part en voyage au Maroc où, semble-t-il, il s’initie aux drogues. C’est en tous cas à son retour que ses proches constatent que son état mental commence peu à peu à se détériorer. Peu à peu en effet, ce grand garçon plutôt beau et doué sombre dans la dépression et le repli. La drogue, Nick Drake l’évoque dans cette chanson : « The Thoughs of Mary Jane ».
6. Nick Drake : River Man (« Five Leaves Left ») ‐ Island
Nick Drake vit quelque temps dans une minuscule chambre à Cambridge où il étudie l’anglais, au Collège Fitzwilliam. Des études qu’il abandonne lorsqu’il pense être certain de mener une carrière dans la musique. En contrebas, il y a un petit pont qui traverse la rivière et qui conduit au domaine universitaire. Ce trajet quotidien lui inspire sa plus belle chanson : « River Man ».
7. Van Morrison : Beside You (« Astral Weeks ») ‐ Polydor
Nick Drake ne cesse de jouer de la guitare, de chanter et de composer. Mais il écoute beaucoup de musique aussi. Nous voici en 1968. En Provence, où il s’est rendu avec des amis, il a découvert et apprécié la chanson française : Juliette Greco (un personnage sombre) et Jacques Brel bien sûr. Au niveau anglo-saxon, ce sont Randy Newman et Bob Dylan qu’il apprécie. Puis aussi Van Morrison qui publie à l’époque le fabuleux « Astral Weeks ».
8. Fairport Convention : Tam Lin (« Liege & Lief ») ‐ Island
Nick Drake obtient quelques contrats même si, très rapidement, il dégage sur scène un sentiment de mal-être qu’il ne peut contrôler. C’est toutefois lors d’une de ses rares prestations qu’un déclic survient. Ce concert a lieu à une date dont personne ne se rappelle. Par contre, le lieu, c’est le Roundhouse à Londres. Dans le public, il y a Ashley Hutchings, le bassiste du groupe Fairport Convention dont Nick Drake assure la première partie. Un groupe qui vient d’être signé sur le label Island et dont le manager est le producteur Joe Boyd. Vous le devinez, tout peut alors s’enchaîner ! On écoute le Fairport Convention : « Tam Lin », un extrait de leur album « Liege and Lief ».
9. Nick Drake : Cello Song (« Five Leaves Left ») ‐ Island
Nick Drake obtient un contrat d’enregistrement avec Island, un label qui perçoit tout le potentiel de ce jeune chanteur folk. C’est Joe Boyd qui est chargé de produire son premier album auquel il donne le nom d’une indication que l’on retrouve à la fin de chaque paquet de papiers à cigarettes de la marque Rizla : « Five Leaves Left » (soit pour résumer : « attention il ne reste plus que cinq feuilles. »). Joe Boyd et Island ne mettent aucune pression. Nick Drake a vingt et un ans, il pourra prendre le temps qu’il faut. L’album finit par sortir en septembre 1969, plus d’un an après le démarrage des premières sessions d’enregistrement. En voici un extrait : « Cello Song ».
10. Judy Collins : In my Life (« In my Life ») ‐ Elektra
Un petit mot au sujet du producteur, Joe Boyd. Un producteur américain encore très jeune à l’époque, à peine vingt-huit ans, mais qui pourtant avait déjà produit le premier single de Pink Floyd, lancé le Fairport Convention et travaillé avec des gens comme Judy Collins. La patte Joe Boyd est très perceptible ici. Judy Collins en 1966, « In my Life » une chanson des Beatles qui figure sur un album de reprises du même nom.
11. Nick Drake : Way to Blue (« Five Leaves Left ») ‐ Island
Nick Drake obtient donc une carte blanche complète. Il ne se mêle pas trop du line-up (on retrouve parmi les musiciens des membres de Fairport Convention, Dany Thompson de Petangle et des musiciens du domaine classique). Par contre, il se montre insatisfait de certains arrangements de cordes qu’il souhaite confier à un ami du Collège de Cambridge, Robert Kirby. C’est risqué, le jeune homme a peu d’expérience… Mais à l’écoute de ce « Way to Blue », le seul titre sans guitare de l’album, force est de constater que ce pari s’avère gagnant…
12. The Times : Fruit Tree (« Brittle Days – A Tribute to Nick Drake ») ‐ Imagination
Malheureusement, « Five Leaves Left » sera un échec commercial complet. Pas de single prévu, pas de concerts, aucune interview – Nick Drake est de plus en plus introverti – bref, aucune chance de percer à l’époque alors qu’au même moment, Jethro Tull, Donovan, ou encore le Fairport Convention sortent simultanément leur album. Il semblerait que, jusqu’à la mort de Nick Drake qui surviendra cinq années plus tard, il se soit écoulé environ cinq mille exemplaires de cet album… Bref, pratiquement rien à l’échelle de la pop music. Cet échec annoncé figure dans les paroles d’une chanson qui fait partie de « Five Leaves Left », « Fruit Tree » dont nous allons écouter une version enregistrée par le groupe britannique The Times et où Nick Drake compare la gloire à un arbre fruitier qui court à sa perte si ses racines ne sont pas solidement accrochées à la terre.
13. Jean Sibelius : The Swan of Tuonela (« Lemminkäinen Legends ») ‐ Sony Classic
Vaste retour en arrière – oui à peine vingt ans en ce qui le concerne – et premiers émois musicaux pour Nick Drake, né en Birmanie et élevé en Angleterre. C’est avec « Le Cygne de Tuonela » que nous clôturons le premier chapitre de cette saga consacrée à Nick Drake. Une composition de Sibelius qui effrayait l’enfant Nick Drake. La suite dans un mois…
Intervalles sur Equinoxe FM
Chaque mardi à 22 heures (rediffusion le jeudi, 22 heures)