Matteo Di Leonardo : Echo Woods

Matteo Di Leonardo : Echo Woods

Coast to Coast

Ne serait-ce pas un poème symphonique qu’on entend ? Echo Woods n’est, en effet, pas une simple suite de « chansons » mais bien une histoire, une sorte de « suite orchestrale », façon jazz. Le guitariste italien Matteo Di Leonardo (qui vit à Bruxelles depuis 2015) est un jazzman aussi talentueux que discret. Pour ce nouvel album, qu’il a longuement maturé (le dernier datait de 2018) afin de lui donner une identité propre, il a décidé d’ajouter à une base traditionnelle d’un trio guitare, contrebasse (Emanuel Van Mieghem), batterie (Umberto Odone), trois instruments moins habituels : la clarinette basse et ténor et soprano de Toine Thys, mais aussi et surtout le basson de Marcello Giannandrea et le sheng de Shao-Huan Hung. L’envie de composer, de construire, d’échafauder et, bien entendu, d’échapper au conventionnel est évidente. Le disque s’articule donc comme un opéra jazz, avec « Ouverture » et sa suite qui décrit les sentiments profondément humains (« Faith », « Joy »…). Le besoin de partager mélodies et ballades poétiques est plus fort que tout. Matteo veut cependant et absolument prendre la tangente, pour éviter le tout-venant et proposer (sans imposer) sa vision de la musique, du jazz… Bref, de la vie, tout simplement. Alors, il joue avec les timbres des soufflants de façon perspicace, y introduisant ainsi une ambiance à la fois boisée, organique, rassurante et décomplexée. La sonorité du basson en « fond » et de ce sheng qui rappelle autant le vibraphone que l’orgue, nous sort de « l’attendu ». Toutes les compos sont de la main de Matteo et les seules pièces rapportées (les standards « Quiet Now » et cette réécriture fabuleuse de « Have you Met Miss Jones » !!! ) s’inscrivent magnifiquement dans l’ensemble car elles sont façonnées comme de la marqueterie pour s’enchâsser admirablement au tableau. Matteo di Leonardo a le sens des arrangements mais aussi celui de la narration. Alors, n’allez pas m’écouter ça d’une oreille distraite… Mais prenez plutôt le temps d’en savourer toutes les nuances.

Jacques Prouvost