Ogives : La Mémoire des Orages
Sub Rosa / Mandaï Distribution
Je me suis souvent demandé ce qui avait amené Pavel Tchikov à la musique quand, pendant les années de son enfance dans sa Russie natale, germa en lui l’idée de s’emparer d’un instrument pour en faire sortir des sons. La première fois que j’ai été à la rencontre de sa musique, c’était une veille d’avant-veille de Noël, il y a plus de cinq ans déjà, dans la nef de l’église Sainte-Catherine à Liège. Je fus alors saisi par l’inspiration spirituelle assumée qu’elle déployait tout en charriant ses fracas, ses fatras. Hgu préfigurait en quelque sorte ce qui allait devenir Ogives. Que de chemin parcouru depuis. Et que de kilomètres franchis entre le plateau de Vottem et l’Electrical Audio de Chicago.
« La Mémoire des Orages » est un disque ambitieux, homérique, d’une durée d’une heure et quart. Décliné en deux vinyles, il aligne des compositions qui se répondent en symétrie. Tête pensante, tête pansante, Pavel Tchikov en revendique la paternité tout en reconnaissant qu’il doit autant à ses propres inspirations (monodies romanes, chants byzantins, contrepoints baroques, avatars modulaires…) qu’à ses sept condisciples (huit en live) qui l’accompagnent corps et âme dans l’aventure. Il ne laisse rien au hasard, attentif tant aux jeux harmoniques qu’aux articulations et arrangements, ne cédant, concédant sa place qu’au mixage final à Steve Albini. Post-rock progressif ou rock post-progressif ? Le débat entre affidés demeure ouvert… Pour notre part, nous tenterions de situer cet opus sur une cartographie moins réductrice, quelque part entre la machinerie sublimée du Mecano hollandais du début des années 80, le lyrisme écorché de Godspeed You! Black Emperor, la quête sacrale d’Arvo Pärt et « Les Âmes mortes » de Gogol.