Pauline Leblond Double Quartet + 2 : L’oubli

Pauline Leblond Double Quartet + 2 : L’oubli

Autoproduction

Que la trompettiste Pauline Leblond aime se frotter à tous les styles, on a déjà pu le remarquer dans ses participations à des grandes formations aussi différentes que le « Jazz Station Big Band », « Flat Earth Society » ou le « Umlaut Big Band ». Sans doute, ces orchestres ont-ils en commun le soin qu’ils portent aux arrangements, et ça, c’est clairement dans l’ADN de la trompettiste. Cet attrait pour l’association d’un quartet jazz et d’un quatuor à cordes n’est pas nouveau, mais Pauline Leblond le développe sur ce nouvel album intitulé « L’Oubli » en y ajoutant de nouvelles couleurs avec deux souffleurs supplémentaires, un trombone et un sax. Un tentet donc.

Il y a de la joie dans cet album dès les premières mesures, le titre du premier thème déjà en dit long : « The Quick Brown Fox Jumps Over The Lazy Dog » débute comme un fox-trot, enlevé, joyeux, rythmé sur les solos de trombone et trompette où viennent se greffer les cordes ; sax et trompette s’entrecroisent, le trombone s’en mêle et le final abrupt surprend. Ce sens de la mise en place sera un peu le fil rouge de l’album. Sur « Brassade » introduit par le quatuor à cordes, on découvre le thème joué par la clarinette, veloutée et tendre puis au trombone auxquels Pauline Leblond laisse de l’espace sur des cordes vibrantes avec son solo de bugle qui vous colle à l’oreille. « Gavotte de la Nouvelle Orléans » résonne comme un collage entre une danse traditionnelle française et le dixieland. « Olvidas » est un texte de Pablo Neruda que Pauline traduit simultanément avant de s’exprimer sur « Si tu m’oublies » comme une transcription musicale du poème, dont la tension finale est prenante. Sur un autre poème de Neruda, après une première partie orchestrale lente, le sax s’envole sur des accents bop et même free.

Tout au long de l’album, Pauline Leblond, grâce à des arrangements subtils et équilibrés, évite le piège de la resucée stylistique, et nous offre un beau moment de plaisir musical à la fois original, hors du temps et des convenances d’un genre un peu délaissé aujourd’hui, et c’est bien dommage.

Jean-Pierre Goffin