Philippe Gonin : Pink Floyd ‐ Animals

Philippe Gonin : Pink Floyd ‐ Animals

« Animals » ?! Fichtre, pourquoi celui-là ? Les fans du groupe anglais pourraient s’en étonner. Du moins ceux de la deuxième vie du Floyd, celle qui s’étend – disons – entre la date du limogeage de Syd Barrett (en fait le 26 janvier 1968, lorsque ses « amis » décident de l’abandonner au bas de son immeuble où il attend qu’on vienne le chercher pour rallier la salle où ils jouent ce soir-là) et le sabordage autoproclamé par Waters en 1985. Entre ces dates, il y a quelques albums de transition, puis une trilogie « Dark Side » / « Wish You Were Here » / « Animals » qui coïncide à la prise de pouvoir croissante de Waters et au succès planétaire de Pink Floyd. « The Wall » et « the Final Cut » ne devant déjà plus être considérés comme étant les albums d’un véritable « groupe ».

Pour ces fans (de la deuxième époque, donc…), « Animals » fait figure… de vilain petit canard. On ne quitte décidément pas la ferme ! « La ferme des animaux », puisque Waters, en construisant son thème, s’inspire ici d’un roman écrit par George Orwell trente ans plus tôt… Ne se trouvant pas politiquement en phase avec le romancier londonien (mais avec qui parvenait-il à s’entendre ?), Waters dévie le propos qui, d’une critique du régime soviétique, devient une attaque contre le système capitaliste. Seul point commun entre eux : le constat que l’homme est un prédateur pour l’homme…

Si ces fameux fans (de la fameuse deuxième période) ont pris le pli de considérer que ce disque était inférieur aux autres, c’est parce que « Animals » se situe très clairement à une période charnière, celle qui correspond à la fin annoncée de Pink Floyd. A juste titre, Waters estime que c’est lui qui apporte l’essentiel du matériel (thèmes, paroles et musiques) au groupe dont il prétend être le seul leader, tandis qu’à juste titre (aussi), Wright et Gilmour assurent que, sans eux, l’œuvre de Pink Floyd se limiterait à quelques chansons folk mal fagotées. Quant à Mason, il compte les coups et les coûts sans trop se mouiller… Au-delà des problèmes d’ego, il y a bien évidemment des problèmes de sous. Or, si seul (ou presque) le nom de Waters apparaît dans les crédits sur les pochettes, cela sous-entend aussi qu’il ne laisse aux autres que les miettes du pactole « Pink Floyd ».

Voici le (triste et nauséeux) décor planté. Dans ce livre de près de 150 pages (quand même !), Philippe Gonin restitue le contexte pas à pas (cette sombre histoire démarre au printemps 1974), nous rappelle que « Animals » est sorti en pleine vague punk, ce dont Waters comme les autres se souciaient peu. En bonus, Gonin nous apporte son analyse de musicien avec – sans doute – quelques détails qui en égareront quelques-uns. Mais au final, son livre est passionnant car il ne se limite pas à une chronique (de 150 pages…) d’un album qui, les décennies passant, se révèlera être une pièce angulaire dans l’histoire du rock (et plus…), au même titre que « Dark Side », « The Wall » et « Wish You Were Here », qui, eux aussi ont été décortiqués par le même auteur… Et donc à la question « Pourquoi cet album ? », nous répondrons simplement que lui aussi méritait une mise en lumière. Ce que Philippe Gonin a parfaitement réalisé.

Philippe Gonin
Pink Floyd ‐ Animals
Le mot et le reste

17 €
ISBN : 978-238431-577-2
152 pages

Yves Tassin