Profondo Scorpio : Profondo Scorpio

Profondo Scorpio : Profondo Scorpio

L’Étourneur

Après nous avoir proposé différentes productions ancrées dans le rock alternatif, indépendant, alternant entre des consonances bruitistes, secouantes et des musiques plus nuancées voire dépouillées, retenues, mais toujours d’une belle richesse, le label de Caen nous ouvre une autre voie. Celle du jazz côtoyant le cinéma giallo. Ce jazz qui accompagne un genre cinématographique propre aux réalisateurs italiens, comme Mario Bava ou Dario Argento et qui mélange, souvent en noir et blanc, le film policier, le film d’épouvante, le film érotique.

Profondo Scorpio, ce sont quatre instrumentistes qui se partagent batterie, basse, trompette et saxophone baryton. C’est à ce dernier, joué par Samuel Frin (également membre des formidables Dustman Dilemma), que l’on doit les compositions de ce premier album et aussi les interventions de choses plus étranges répertoriées, comme radio et objets ! Ne serait-ce que de par sa source d’inspiration, ceci est déjà une belle surprise. Entre morceaux joués en quatuor et intermezzos (au nombre de 6) plus confidentiels, ce jazz nous évoque des images de ruelles sombres, d’ombres flirtant avec les murs et de réverbères aux faibles lueurs. Et un personnage, régulièrement une femme, qui chemine vers Dieu sait où ! Certainement vers une lame ! On craint le cri, l’hémoglobine…. Puis des pas qui fuient… Via un texte évocateur au recto de la pochette, on peut suivre une scène de crime. Ce texte nous guide, tranquillement, vers la musique à écouter en parallèle. Le groupe magnifie ces instants, installe des tensions, du suspense (efficaces lignes de basse dans ces moments). La batterie perturbe ou active nos pulsations, les cuivres se veulent cajoleurs puis nous embarquent dans des duos percutants. Et quand les quatre jouent de concert c’est admirable. Un sifflement introduit le dernier titre. C’est comme un dénouement final et on s’imagine regarder défiler le générique de fin.

Profondo Scorpio nous a ému, a fait fructifier notre imagination. Des scènes se sont révélées à l’écoute d’un jazz superbe, créatif, original. Une porte vers un style quelque peu daté, oublié, s’est entrouverte et ce fut délectable de s’y laisser guider. Faites-en de même au travers de cette admirable, surprenante et rare démarche. Un jazz cinématographique à vénérer.

Le label L’Étourneur vous sera présenté sur notre site ce mercredi 2 mars.

Claudy Jalet