Roberto Ottaviano – Aexander Hawkins : Charlie’s Blue Skylight

Roberto Ottaviano – Aexander Hawkins : Charlie’s Blue Skylight

Dodicilune

Voici un nouvel hommage à Mingus, figure mythique hors temporalités. Deux approches différentes, hétérogènes parce que de générations différentes. Roberto Ottaviano est né en 1957, a connu toute la génération du free jazz italien. Alexander Hawkins, pianiste chéri du label Intakt, fait partie du nouveau jazz émergent. Ottaviano dispose d’une discographie pléthorique : entre autres, « The Leap » avec Ray Anderson, « Black Spirit Are Here Again » avec Mal Waldron, « Astrolebio » avec Gian Luigi Trovesi et Glenn Ferris, « Sotto di sole » avec Stefano Battaglia, un album solo (qui a fait le bonheur de Pierre Vaiana) et tant d’autres. Alexander Hawkins a enregistré avec Evan Parker (« Leaps in Leicester »), avec Louis Moholo (« Keep Your Heart Straight ») un solo (« Sing Singular ») et nombre d’albums pour le label Intakt.

Il ne faut pas croire que ce « Charlie’s Blue Skylight » soit un pur album de duos. Il s’ouvre sur « Canon », une vertigineuse prouesse d’Ottaviano en canon de sopranos qui serpentent, s’enlacent pour mieux se séparer, s’envoler chacun de leur côté. Une réelle prouesse, un pur moment de musique. D’autres pièces sont effectivement jouées en duo, avec de larges espaces pour chacun : « Hobo Ho », « Remember Rockfeller at Attice », « Us Is Two », « Self Portraits in Three Colours » (lire un « Underdog » où Mingus exprime cette frustration… Il n’est pas vraiment noir, pas vraiment blanc, juste « yellow », soit métis. Donc, il ne pourra jamais être violoncelliste classique dans un orchestre « blanc »). Si le piano intervient souvent en premier, le soprano peut prendre le devant, avec des effets étonnants (« Pithecantropus Erectus »). De leur côté, « Smooth A.K.A. Weird Nighmare » et « Haitian Fight Song » sont introduits au Fender Rhodes, le second pour se lancer sur un rythme trépidant. L’un et l’autre peuvent avoir leur solo : Hawkins sur l’ironique « Oh Lord, Don’t Let Them Drop that Atomic Bomb on Me » et Ottaviano sur le politique « Free Cell, Block F this Nazi USA ». Un hommage hors du commun par deux grands musiciens de générations et parcours différents.

Claude Loxhay