Shemekia Copeland : Done Come Too Far

Shemekia Copeland : Done Come Too Far

Alligator ‐ Références catalogue : ALCD5010

On ne présente plus Miss Copeland… Elle est née en 1979 à Harlem. Enfant de la balle et enfant prodige, elle se produit à 8 ans avec sa vedette de père, Johnny Copeland, au Cotton Club de New York. Elle enregistre son premier album pour Alligator à 19 ans (« Turn the Heat Up ») et d’emblée, c’est le succès : « a star is born » ! D’album en album et d’année en année, Copeland affirme son talent, sa forte personnalité, sa maîtrise vocale. Il y a de l’autorité et du dynamisme dans sa voix, elle fait l’unanimité et, entre 1998 et 2005, elle remporte 8 Blues Music Awards et d’autres prix, des nominations aux Grammy Awards.

En 2022, elle signe son huitième album sous label Alligator, avec son duo habituel et gagnant de producteurs, John Hahn et Will Kimbrough (+ gt) qui sont aussi les compositeurs d’une bonne partie de son répertoire (ici 9 des 12 titres). Depuis « America’s Child » (2018) et « Uncivil War » (2020), Shemekia Copeland est de plus en plus concernée par l’état catastrophique du monde actuel, le racisme, la haine, la xénophobie, la violence sous toutes ses formes, les conflits et le manque de conscience sociale. Cela donne des textes forts, engagés et courageux au service desquels elle prête sa voix unique et son talent.

Dans ce nouvel opus, avec une belle série de guests, elle continue cette croisade et essaie, dit-elle, de remettre le terme « united » dans United States. Elle aborde frontalement la maltraitance des enfants victimes de violences sexuelles dans un « The Dolls Are Sleeping » débordant d’émotion, ou les enfants victimes de la prolifération insensée des armes à feu dans son pays, évoquant la tragédie d’Uvalde (Texas) dans « Pink Turns to Red » (avec Kenny Brown, gt). Elle aborde aussi la violence policière endémique en Amérique dans « The Talk », un dialogue entre une mère et son fils (I don’t want to loose you some day…) avec Charles Hodges Jr au Hammond B3. Autre thème, l’histoire et les relations entre races dans « Gullah Geechee » avec Cedric Watson (African gourd-banjo) et des percussions (come across the sea, still trying to be free…) , dans « Too Far to Be Gone » (avec Sonny Landreth (slide gt) et dans le titre éponyme qui nous emmène dans les collines du Nord du Misssissippi avec Cedric Burnside (gt, vo) et Kenny Brown (gt) : If you think we’re stopping, you got it wrong… Il y a aussi des moments plus détendus comme la ballade « Why Why Why » avec Johnny Sansone (keys) ou « Dumb It Down » avec Charles Hodges Jr. (Hammond B3), Pat Sansone (gt, wurlitzer), Joe Cabral (sax). Il y a même place pour des passages festifs comme une virée en Louisiane, « Fried Catfish and Bibles », un two-step bien enlevé qui exsude humour et joie communicative avec la complicité de André Michot (accordéon, ‘tit fer), Cedric Watson (violon), Washboard Chaz (wbd). Humour encore dans un bien enlevé « Fell in Love With a Honky », à consonance « country », avec Aaron Lee Tasjan (gt) et Fats Kaplin (violon, pedal-steel gt). On n’oubliera pas l’hommage de Shemekia à son père, en reprenant une version bien scandée de son « Nobody But You » pour conclure la séance, avec Will Kimbrough qui, outre son rôle de producteur et compositeur, est à la guitare, ici comme dans tous les autres morceaux.  A milestone !

Robert Sacre