Thierry Eliez : Sur l’écran noir

Thierry Eliez : Sur l’écran noir

Label Triton / L’Autre Distribution

Devenu professionnel à l’âge de 17 ans, Thierry Eliez a d’abord croisé la route de Didier Lockwood (album « 1234 ») et d’André Ceccarelli (album « 3 Around the 4 » en trio), mais c’est principalement son poste de pianiste et de directeur musical auprès de Dee Dee Bridgewater, durant 14 années, qui l’a fait connaître d’un très large public. En 2005, Michel Legrand l’appelle pour jouer de l’orgue pour le projet Legrand – Nougaro, ce qui lui permit de croiser Ron Carter. Après plusieurs albums personnels (comme « Improve Extended Trio »), il a décidé de concrétiser un projet qui lui tient à cœur depuis longtemps : consacrer un album aux textes du Toulousain qui ont été mis en musique par Michel Legrand. A ses débuts, Nougaro récitait ses textes au Lapin Agile. Après avoir contacté, en vain, différents interprètes possibles, c’est Michel Legrand, selon ses dires, qui aurait convaincu Nougaro de chanter lui-même ses textes, sur la musique qu’il lui avait composée. Sont ainsi réunis 13 musiques de Michel Legrand et 12 textes de Nougaro. Seul « Les enfants qui pleurent », qui figure sur l’album « Récréation », est d’Eddy Marnay. L’idée originale de « Sur l’écran noir » est d’avoir convié une dizaine de chanteurs et chanteuses, venant d’horizons très différents. D’abord, des jazzmen passionnés par la voix : Thierry Eliez lui-même (« Le cinéma », « Le paradis »); pour « Vachement décontracté », le saxophniste Thomas de Pourquery qui, avec le Red Star Orchestra, avait chanté les textes de l’album « Broadways » et, sur « Le rouge et le noir », le trompettiste Médéric Collignon, féru d’improvisation vocale (notamment au sein du MegaOctet d’Andy Emler). Ensuite des chanteuses aux personnalités très variées : Celia Reggiani, la fille de Serge (« Sa maison »), Ceilin Poggi, à la voix limpide (« Tiens-toi bien à mon cœur » et duo avec Eliez pour « Le paradis »), Stella Vander, l’épouse de Christian Vander du groupe Magma (« Serge et Nathalie »), Paloma Pradal (« Alcatraz »). Et, enfin des chanteurs : Alain Chamfort pour « Ma fleur », Manu Domergue du groupe Raven pour « Splaouch », JP Nataf du groupe Les Innocents pour « Tu dormiras longtemps ». Ce n’est pas la première fois que des jazzmen rendent hommage au créateur de « Le jazz et la java ». On peut penser aux albums de Dédé Ceccarelli, « Le Coq et la pendule » puis « A Nous Garo », avec Pierre-Alain Goualch au piano et David Linx au chant. Ici, rien que des piano-voix, si ce n’est quelques notes de trompette sur la fin de « Le cinéma » et « Le rouge et le noir », un peu d’alto sur « Vachement décontracté » ou le recours à des chœurs pour « Le rouge et le noir » avec P. Pradal, C.Reggiani et C. Poggi. Chacun aura ses préférences, côté voix comme côté originalité avec les impros vocales de T. de Pourquery ou de M. Collignon. Puis, fatalement, les textes les plus connus (« Le cinéma », « Le rouge et le noir ») retiendront sans doute davantage l’attention que des textes moins célèbres (« Serge et Nathalie »). Un pari audacieux.

Claude Loxhay