World Sanguine Report : Song From The Harbour

World Sanguine Report : Song From The Harbour

God Unknown Records

D’abord, il y a la voix. Celle d’Andrew Plummer. Une voix assez grave que l’on catégorisera d’emblée dans celle qui inclut de grands noms tels que ceux de Nick Cave, de Tom Waits, de Captain Beefheart, de Mark Lanegan, de Michael Gira (Swans), d’Andew Eldritch (The Sisters Of Mercy). Rien qu’à la lecture de ces noms, vous situez aisément l’univers dans lequel la musique de Word Sanguine Report va s’installer. Cet album (vinyle et digital) est le troisième de ce groupe, formé à Londres en 2008, et, outre Andrew, l’incontestable leader qui joue aussi de la guitare, compose et produit, il inclut quelques efficaces collaborateurs, doyens du jazz, du rock et de la musique improvisée : Ruth Goller (basse et chant – elle a joué entre autres avec Damon Albarn, Paul McCartney et John Paul Jones), Matthew Bourne (harmonium – entendu notamment auprès de Marc Ribot ou John Zorn) et Will Glaser (batterie). De talentueux musiciens ouverts à de nombreux styles musicaux : jazz, rock, world, improvisations, électroniques, expérimentations. Bourne ayant même été publié sur Ninja Tune pour des réinterprétations de titres du DJ Amon Tobin ! C’est vous dire l’étendue de leurs intérêts musicaux et si cet album n’est que leur troisième, c’est parce que ses membres contribuent à de nombreux projets. Sur celui-ci, c’est au sein d’un univers assez sombre qu’ils évoluent. Des ambiances lourdes, sombres, pesantes. Une rencontre entre le rock délabré issu des distorsions de la guitare et le blues rugueux du désert accentué par la rythmique martelée, hypnotique (« Starboard ») et quelques fois éclairée par les interventions de Ruth et de son chant délicat. « Into The Light » résume quelque peu l’éventail sonore en se présentant comme une ballade. Mais étrange. Elle nous déroute avec ces sons étirés, des sifflements et ce chant féminin tout en douceur puis la chanson se nourrit d’une progression puissante avec des voix mixtes avant un retour vers l’accalmie. A noter que parmi les neuf chansons / incantations / hymnes, il y a la reprise de « No Kids » de John Lurie et que « Litany Of Losses » lorgne vraiment vers les Bad Seeds et avec bonheur. Quant à la plage finale « The Catching Of The Bull », elle possède un aspect sacré, liturgique, cérémonial assez déroutant. Qualificatif qui accompagne pratiquement l’entièreté de cette musique et de cette voix singulière, profondément ancrée dans le « dark ». Mais moi, tout cet univers bizarre, inquiétant, je valide !

Claudy Jalet