Zwerm : Great Expectations

Zwerm : Great Expectations

Time Goes By / N.E.W.S.

Zwerm est un quatuor belgo-néerlandais formé, déjà en 2007, par quatre guitaristes électriques : Toon Callier, Johannes Westendorp, Kobe Van Cauwenberghe et Bruno Nelissen ! Bien sûr ce groupe est davantage un projet qu’une véritable entité à la destinée bien définie. Mais sait-on jamais à l’écoute de ce superbe album. Depuis sa formation, ces musiciens ont été aussi impliqués dans des groupes accompagnants des artistes tels que Fred Frith, Mauro Pawlowski, Stephen O’Malley (Sunn O))). On notera également des performances avec des compagnies de danse ou des participations à des pièces de théâtre. Ce n’est qu’en 2018 qu’un album avec leurs propres compositions a vu le jour : « Badminton in Tehran ».

Pour ce nouveau cd, le groupe s’est adjoint les services de la batteuse / percussionniste Karen Willems (entendue au sein de Zita Swoon) et a vu Rudy Trouvé s’occuper de la production. Depuis dEUS on peut dire que Rudy s’est retrouvé impliqué dans des choses superbes telles que Dead Man Ray ou Kiss My Jazz mais aussi dans des projets moins inspirants comme son Sextet que j’avais trouvé relativement froid et peu imaginatif en concert. Mais ici il se distingue à nouveau par un travail de production impeccable. La musique de Zwerm est peu rigoureuse dans le sens où les guitaristes désaccordent leurs instruments, les pédales… Ou utilisent un piano usé (fantastique sur « Peel off the Sentiment »), un saz (luth turc, pour donner parfois une petite sensation orientale) mais sans donner l’impression de jouer de fausses notes. Un procédé qui n’est pas sans nous rappeler le déjà nommé dEUS ou Captain Beefheart. Le groupe voyage entre rock, pop, psyché, même un peu de progressif, lance de superbes harmonies vocales, utilise des collages ainsi qu’un peu d’expérimentation, de bruits, de dissonances… Mais Zwerm sait surtout se montrer d’une redoutable efficacité harmonique, c’est parfois d’une beauté à vous donner des frissons. Nous parcourons cet album comme si nous découvrions une bibliothèque sonore. Nous y croiserions les Beach Boys, Frank Zappa, les Beatles, XTC, Père Ubu, The Ex, Robert Fripp, Sonic Youth, The Fall, PIL… mais avec l’originalité d’une musique essentiellement produite par des guitares qui savent se montrer ciseleuses ou rageuses. L’apport d’une batterie est aussi un véritable élément catalyseur, décisif dans cet univers. Sans négliger la puissance émotive des voix, des chœurs. Et étonnamment, vu le contexte un peu expérimental, aventureux, défricheur et l’efficacité des refrains que nous n’attendions pas aussi accrocheurs ! Un disque qui vous captive dès ses premières notes et qui va vous subjuguer jusqu’à la dernière. Sans aucun doute, un des disques (belges) de l’année, toutes catégories confondues.

Claudy Jalet