Amaury Faye Trio, Live In Brussels
Amaury Faye Trio,
Live in Brussels
Installé à Bruxelles depuis trois ans, le pianiste français Amaury Faye s’est vite révélé dans le paysage du jazz belge. On l’a principalement découvert au sein du groupe du contrebassiste Giuseppe Millaci avec Lionel Beuvens à la batterie, un trio qui s’est imposé comme une des révélations récentes avec l’album « Songbook » récompensé par le Prix Point Culture aux Octaves de la Musique 2018. Avant son arrivée au Plat Pays, le pianiste est passé par le Berklee College de Boston où il a étudié avec Joanne Brackeen – magnifique pianiste notamment aux côtés de Joe Hendreson et Stan Getz, après lesquels elle entama une carrière de soliste assortie de nombreuses références discographiques. Amaury Faye obtenait également plusieurs prix réputés au Tremplin Jazz d’Avignon et à Jazz à Vienne. Voici son premier album en trio avec Louis Navarro à la contrebasse et Théo Lanau à la batterie, ce dernier déjà bien présent sur la scène belge avec des apparitions auprès de Laurent Blondiau, Sylvain Debaisieux, Bart Maris, Lynn Cassiers et d’autres encore. Un premier album loin d’être le dernier puisque le pianiste nous annonce déjà une série de cinq enregistrements avec ce trio dans cinq capitales européennes et répartis sur cinq années. L’idée ne manque pas d’originalité et titille déjà notre curiosité et notre impatience à entendre ce qui suivra tant la qualité de ce premier enregistrement est réelle et même enthousiasmante. Quatre compositions personnelles et trois standards composent cet enregistrement en public réalisé à la « Jazz Station », Chaussée de Louvain à Bruxelles. D’emblée, Yosemite donne le ton d’un jeu original fondé surtout sur des influences européennes avec une scansion rythmique appuyée qui tient en haleine de bout en bout. Le concert enchaîne ensuite les trois standards : Ugly Beauty de Thelonious Monk revu dans un climat apaisant, contrastant avec le Fascinating Rhythm de Gershwin enlevé à un tempo très rapide avec une aisance qui en fait oublier le côté piégeux de l’exercice. They Didn’t Believe Me de Jérôme Kern, magnifique mélodie reprise entre autres par Frank Sinatra et Dinah Washington, est littéralement chantée par le piano sur près de dix minutes. Suit Interlude qui maintient le climat paisible du thème précédent dans un esprit « musique classique » plus sombre jusqu’au crescendo final. On soulignera le sens de la mise en scène musicale du leader et son à-propos dans la construction du concert par cet enchaînement sans faille avec l’explosif The Old Escalator. Ilex clôture le concert en toute légèreté avec un brin de fantaisie dans les changements rythmiques et les interventions de ses précieux partenaires Théo Lanau et Louis Navarro. On se repassera longtemps ce beau concert bruxellois en attendant la suite de ce périple européen.
Jean-Pierre Goffin