Bertrand Renaudin : Play.
Bertrand Renaudin, Play (OP Music)
Grave,le quartet !
Découvrir le jazz par Kenny Clarke et le trio qu’il formait avec Eddy Louiss et le Liégeois René Thomas ne peut qu’attiser la curiosité et la sympathie de tout bon Belge jazzophile. Rarement aussi on parle de poésie, mélodie, éther, légèreté lorsqu’on évoque un batteur : Bertrand Renaudin inspire toutes ces idées à la fois… Caresseur de peaux et non cogneur catégorie poids lourds, ce batteur français pas né d’hier (1955) ose les formules qui sortent des sentiers battus : il est un des rares à présenter un spectacle solo sans déclencher l’irritation des tympans, et crée aussi des recettes originales ; son dernier album en quartet en est une réjouissante illustration : associer ses caisses et cymbales aux voix graves de la double basse ( Yves Torchinsky), du vibraphone (Thierry Bonneaux) et du trombone (Jean-Louis Pommier) est une formule rare , sinon inédite. A travers un répertoire original à 100% de la plume du leader, Bertrand Renaudin écorne aussi l’image du batteur rythmicien appelé à « garnir » la musique des autres. Le résultat est surprenant, du moins pour celui comme moi qui à ce jour ne s’était jamais attardé sur la musique de cet équilibriste-magicien des percussions : Bertand Renaudin joue, comme le titre de l’album « Play », mais jamais il ne surjoue ; l’espace laissé aux partenaires est considérable, le sentiment à l’écoute est celui d’une liberté créative constante et d’une grande souplesse dans les interventions de chacun, ce qui permet d’apprécier un soliste comme Jean-Louis Pommier visiblement à l’aise dans ce concept libertaire. Un album dont l’écoute répétée multiplie le plaisir éprouvé à l’infini.
Jean-Pierre Goffin