François Wong – Davide Barbarino : Genuis Loci
Plusieurs fois par an, mon chemin me mène aux abords de Puget-Ville que je contourne par la D97 sans m’y arrêter. Jusqu’alors, je ne connaissais pas l’existence de la Chapelle de Sainte-Philomène qui se trouve à l’ouest de cette localité du Var, logée dans le maquis. Vieux de plusieurs siècles, le lieu se love sans ostentation dans le paysage, mais s’impose dans la quiétude qui s’y dégage. C’est là que François Wong et Davide Barbarino ont enregistré une partie des pièces qui se trouvent sur cet album. Les deux saxophonistes soprano dialoguent dans le plus simple appareil, comme s’ils tenaient un conciliabule à l’abri des regards et des oreilles du monde. Le titre des quatre morceaux dédiés à l’intérieur de la chapelle renvoie au religieux, pas tant pour ce qu’il incarne, plutôt pour ce qu’il évoque. La spiritualité est ici délestée du dogme, de l’idéologie. Pour l’auditeur, l’expérience sonore s’avère impressionnante, au sens premier du terme, tant on est là à l’écoute d’un mouvement essentiel qu’aucun ornement, qu’aucun gimmick ne vient perturber. C’est l’esprit du lieu qui règne. Au fur et à mesure que progresse l’écoute, d’autres pièces, enregistrées, elles, dans le village de Puget, notamment dans la cave vinicole et dans un cellier, se dévoilent. Barbarino utilise également son baryton, mais l’équilibre entre les deux musiciens demeure, sans que l’un prenne le dessus sur l’autre. Là aussi, l’esprit des lieux est bien présent et il transpire dans les sonorités qu’ils créent, largement improvisées. C’est à Puget que le contrebassiste américain Barre Philipps (le disque lui est dédicacé) passa une grande partie de sa vie et c’est dans ce même village que le CEPI (Centre Européen pour l’Improvisation), son organisation, vit le jour et tint maintes sessions qui, paraît-il, furent mémorables pour ceux et celles qui les vécurent.