Jean-Michel Pilc : Symphony
Séduit par le Steinway et les qualités acoustiques du studio CARA-OJM à Matosinhos, Portugal, où il a collaboré en novembre 2021 à un album avec le saxophoniste Xose Miguélez, Jean-Michel Pilc s’est laissé emporter dans une longue improvisation en solo qui a heureusement été enregistrée et qui est aujourd’hui éditée sous le nom de « Symphony ». Bien que séparée en dix plages, la musique donne l’impression que l’entièreté du programme a été joué d’un seul tenant (il n’y a quasiment pas de silence entre les titres). Ce long divertimento de 50 minutes évoque ainsi l’esprit des disques en solo réalisés par Keith Jarrett, ne serait-ce que par le processus mais également, au-delà, par l’émotion intense qui se dégage de cette œuvre, ainsi que par sa cohérence et sa fluidité. Difficile d’ailleurs de savoir si l’on doit parler pour cette « Symphonie » d’improvisation libre ou de composition spontanée.
Une des caractéristiques les plus évidentes de cette musique est l’attachement montré par le pianiste français au regard de la mélodie. Et des mélodies, il y en a une myriade ici ! Toutes plus belles les unes que les autres. De Bud Powell à Arthur Rubinstein en passant par Chick Corea, les exégètes pourront par ailleurs se pencher sur les multiples influences qui sous-tendent le jeu de Mr. Pilc, mais ce qu’on retient avant tout, c’est qu’il s’agit d’une performance unique, téméraire, inspirée et, finalement, bouleversante. Au cours du voyage, l’auditeur rencontrera des moments lyriques et quasi contemplatifs (« Leaving », « The Encounter »), des déflagrations rugissantes (« Just Get Up »), des tourbillons de notes virevoltant telles des feuilles emportées par une bourrasque automnale (« Way to Go »), des passages sophistiqués qui semblent interprétés en lecture d’une partition écrite (« Waltz for Xose ») et des thèmes romantiques et émouvants comme des musiques de films (« I’ll Be Back »). Autant de tableaux différents qui constituent une exposition riche et colorée dont on sort plus que ravi.