Pépites #65, Around Jazz
Around jazz, quelques pépites…
C’est du jazz… mais pas tout à fait non plus.
Voici une collection de disques qui méritent qu’on leur rétrocède une oreille très attentive.
Sahra Halgan,
Waa Dardaaran
Il y a cette petite république africaine : le Somaliland. Un pays autoproclamé indépendant depuis une trentaine d’années, mais toujours pas reconnu par la Communauté internationale. Trois millions et demi d’âmes, enclavées entre la Somalie et l’Éthiopie. Bien avant encore, Sahra y adoptera le surnom de « Halgan », « la combattante », qui n’hésitait pas à se porter au front pour soigner et encourager ses frères d’armes. Personne là-bas ne l’a oubliée ! Contrainte à l’exil en France durant une vingtaine d’années, Sahra Halgan finit par reprendre le chant, cette voix au trémolo particulier, source de son engagement indéfectible. Elle fonde le Sahra Halgan Trio puis reprend la route pour son pays natal où elle compte bien contribuer à sa reconstruction. Cette histoire (avec un petit « h ») fait bel et bien partie de notre Histoire à nous tous (vous aurez remarqué l’utilisation ici d’un grand « H »). Nous l’ignorerions… Si le label Buda Musique – et en particulier son co-fondateur Gilles Fruchaux – ne nous ouvrait pas grand les yeux et les oreilles, aux détours de défrichages et de belles découvertes. Car ce disque, revenons-y, est une très belle découverte musicale aussi. Les sources et les influences sont visibles. Il y a l’Éthiopie pas très loin, son groove magnifique et hypnotique. Il y a les sonorités du rock que les colonisateurs britanniques, d’abord, puis ses musiciens français ensuite, lui ont inoculées en mode vintage. Mieux qu’un disque qui nous transporte et nous invite dans une danse tourbillonnante, « Waa Dardaaran » est un magnifique cri d’espoir.
Benedicte Maurseth,
Benedicte Maurseth
De Benedicte Maurseth, nous ne savions quasiment rien, ou si peu… Les amateurs du label ECM se souviennent d’un album « Over Tones » enregistré en 2014 en duo, avec la chanteuse Asne Valland Nordli. Pour ses autres activités, il faut enquêter un peu sur la toile. Depuis, on lui connaît quelques disques produits sous différentes collaborations pour le compte du label norvégien Heilo et une passion avouée pour la musique folklorique traditionnelle norvégienne, au sujet de laquelle elle a écrit quelques essais et consacré l’essentiel de ce disque. « Benedicte Maurseth » n’est « que » son second album enregistré en son seul nom… Un violon Hardanger (aux sonorités proches de la vièle) solo qui puise ses états d’âme au cœur de la musique ancienne. Rien de revêche, rassurez-vous ! La musicienne, son instrument, sa voix (plus rarement) et la résonance naturelle que lui offre une petite église de village où toutes les sessions ont été enregistrées. Ceci suffira à votre bonheur, pour autant que vous acceptiez de débrancher la prise le temps d’une méditation bienvenue…
Galius Swing Project,
Uruk EP
Avant d’être un métier, avec les obligations et le stress qui en découlent, la musique relève surtout du plaisir. Celui des échanges, à moins qu’on ne préfère jouer en solo. Échanges entre générations, cultures et affinités… Faites se rencontrer un musicien issu du milieu classique avec (par exemple) un bassiste rockeur et il y a fort à parier qu’ils vous joueront du jazz ! Ben tiens, nous y voilà ! Avec son patronyme en forme de référence, le Galius Swing Project repose sur les fondements pré-cités. D’anciens élèves du Conservatoire (de Huy) tapent ainsi le carton – c’est une image – avec leur Directeur à la retraite et le pianiste de sessions… Des vents, du rythme, puis une basse et des claviers à la Weather Report. Enfin et surtout, du swing (forcément…). Pas le temps de se prendre la tête; ils ont opté pour le compromis. Sans être d’une modernité londonienne, le jazz électrique du Galius trouvera son public là où on les laissera jouer… pour leur et notre plaisir.
Joseph « YT » Boulier