
The Kris Davis Trio : Run the Gauntlet
Le nom de Kris Davis a déjà évoqué à plusieurs reprises dans nos pages. En mars 2018, nous en dressions le portait en reprenant sa discographie, alors déjà bien fournie et protéiforme. Ce nouvel album la voit revenir à la formule d’un trio dont elle est le leader, une configuration qui rappelle celle dans laquelle elle évolue au sein du Borderlands Trio. Elle est ici entourée par le batteur Jonathan Blake et le bassiste Robert Hurst. Si elle avait collaboré depuis longtemps avec le premier, elle a rencontré le second plus récemment lors d’une session au Village Vanguard. Le propos de « Run the Gauntlet » revêt avant tout la forme d’un hommage. Un hommage rendu à six pianistes femmes qui ont, à des moments distincts et pour des aspects différents, marqué la vie de Kris Davis. D’un côté des figures tutélaires, sources d’inspiration et d’admiration, telles Marilyn Crispell, Carla Bley, et Geri Allen. De l’autre, des relations d’affinités sélectives qui se sont nouées en véritables amitiés, ainsi Angelica Sanchez, Sylvie Courvoisier et Renee Rosnes. S’agissant de Geri Allen, Davis explique qu’elle ne l’a jamais rencontrée, mais qu’à force de l’avoir étudiée, c’est comme si elle connaissait sa musique intimement. Elle nous apprend aussi que Renee Rosnes, dont elle baby-sitta naguère le fils, lui a servi de guide et a précipité son déménagement du Canada aux Etats-Unis. Musicalement, c’est évidemment de piano dont il est avant tout question. Davis règne en maître. Elle déploie, charge, attaque, contre-attaque. Ses motifs sont souvent incisifs, répétitifs, accentuant la cadence au fur et à mesure que le morceau progresse. Onze compositions sont alignées. Les plus remarquables sont sans doute la plage introductive éponyme et le trépidant « Heavy-Footed » qui ferme un triptyque, écrit à l’origine pour le quartet de Dave Holland. En clôture, « Subtones » donne un autre éclairage sur son jeu, plus intimiste mais tout aussi excellent.