Vous faites de la musique ? l’interview hors-champ de JazzMania
Dans nos intérêts généraux, il n’y a pas que la culture… Dans la culture, il n’y a pas que la musique… Et dans la musique, il n’y a pas que le jazz ! Épisodiquement, nous vous soumettrons l’interview d’un personnage hors-champ, peut-être pas célèbre, mais surtout… qui ne fait pas de la musique (ou si peu…).
Philippe Marczewski : tchacatchac tchacatchac tchacatchacatchacatchac (2/2)
Deuxième partie de cette interview, où il sera cette fois question de musique…
«J’ai un peu de mal avec le jazz post-années 80. Ça m’ennuie.»
Venons-en à la musique, pas spécialement le jazz… Il n’empêche : la pochette de « Blues pour trois tombes et un fantôme » laisse entrevoir des préférences (une photo prise en 1968 dans un bar du Carré, à Liège, avec Robert Jeanne, Félix Simtaine, René Thomas, …).
Philippe Marczewski : Pas nécessairement, non. J’ai un peu de mal avec le jazz post années 80. Ça m’ennuie, mais j’admets aussi que je ne connais pas spécialement bien. Je n’aime pas trop les longues ballades un peu flottantes… J’ai besoin de rythme. J’adore le free-jazz, le swing, le be-bop ! Le spiritual jazz aussi. C’est ça que je préfère.
«Voir Nina Simone et John Coltrane à Comblain, j’aurais adoré !»
Tu aurais voulu connaître cette époque, celle de la couverture ?
P.M. : Oh oui ! C’est évident. Voir Nina Simone et John Coltrane à Comblain ! J’aurais adoré ! Je suis né trop tard…
«Ce que je préfère, c’est la cumbia… C’est vraiment ce rythme-là qu’il me faut.»
Pour les besoins de ton roman « Un corps tropical », par la force des choses, on abandonne le jazz au profit de rythmes… tropicaux : la musique cubaine, la cumbia colombienne, la salsa… Ce sont également des choix personnels ?
P.M. : La musique cubaine et la musique brésilienne sont des portes d’entrée pour aborder les musiques sud-américaines. C’est bien pour démarrer. Moi, ce que je préfère, c’est la cumbia.
J’avais repéré ce titre dans ton livre : « Cumbia sobre el mar »…
P.M. : Oui, c’est splendide ! Un classique, j’adore ! En fait, c’est une question de rythme. Et c’est vraiment ce rythme-là qu’il me faut. Il y a aussi ce groupe brésilien, Metá Metá, qui mélange la musique de carnaval et le jazz.
Moi qui suis un grand fan de reggae, grâce à toi j’ai découvert le reggaeton… Je dois t’avouer que je n’accroche pas trop…
P.M. : (il rit) Non, ce n’est pas horrible ! C’est une évolution commerciale du reggae. En Amérique du Sud et en Espagne, tout le monde écoute du reggaeton. C’est une sorte de mélange entre les musiques jamaïcaines et les rythmes sud-américains. Bon d’accord, je n’écoute pas tout le temps du reggaeton. Je crois que c’est la musique qui s’écoute le plus au monde… même si ça ne marche pas trop bien ici.
«Je n’achète pratiquement jamais plus de CD.»
Téléchargement, vinyles ou CD ?
P.M. : D’abord, je ne télécharge jamais. J’écoute en streaming. Vinyles, oui. Je n’achète pratiquement plus jamais de CD. Un ou deux par an peut-être… Il faut vraiment que j’en ai envie et qu’il n’existe pas en version vinyle.
«Je ne suis pas un collectionneur, je n’ai pas l’obsession de la collection.»
Tu es un collectionneur ?
P.M. : Non, pas vraiment. Je ne connais pas l’obsession de la possession. Je ne chasse pas l’édition originale, je n’estime pas la valeur de mes achats…
Je vois que tu as là quelques albums qui vont s’ajouter à ta collection… (l’interview se passe juste après un passage chez son disquaire…)
P.M. : Oui, c’est vrai… Mais ce n’est pas de la collection. Si je n’ai pas d’argent pendant quelques mois, j’écouterai en streaming… Je n’en ferai pas une maladie. J’ai rencontré de vrais collectionneurs. J’ai un peu de mal avec eux… Tiens, avec des amis, on organise des soirées d’écoute. On enchaîne les disques que l’on vient d’acheter, avec un petit esprit de compétition (il sourit).
Trois disques que tu sauves des inondations pour planquer au grenier…
P.M. : Trois !? (il s’effondre). C’est pas possible ! D’abord, ils ne seraient pas les mêmes d’un jour à l’autre. (il réfléchit très longuement). Bon : « My Favorite Things » de Coltrane, « Rock Bottom » de Robert Wyatt… Pour le troisième, je triche. Je glisse dans la même pochette « First Take » de Roberta Flack – son premier album, puis plus rien – et j’ajoute dedans Neil Young. Une partie de « Decade », celle où il joue ses chansons en solo, comme « After the Gold Rush », « Cortez the Killer », … rien que des chefs-d’œuvre !
Pas vache : je te donne le droit de récupérer trois bouquins.
P.M. : Ouf ! C’est compliqué aussi ça ! Je sauve « Les tribulations de Maqroll le Gabier », de Alvaro Mutis. Bon, je triche un peu car c’est une intégrale de neuf romans… Neuf courts romans, mais tu as dit « un livre »… Ensuite, « Monsieur Paul » de Henri Calet. (très longue hésitation) Je réfléchis : j’y reviendrai plus tard ! Attends : « Si par une nuit d’hiver un voyageur », d’Italo Calvino.
La première partie de cette interview a été publiée sur notre site le dimanche 10 octobre.
Philippe Marczewski
Un corps tropical
Éditions Inculte